La position de PEPPOL sur la Directive e-Invoicing

OpenPEPPOL

Open PEPPOL soutient le projet de Directive tout en attirant l’attention de la Commission sur les écueils de la mise en œuvre. Pour Open PEPPOL il est indispensable de préciser les modalités d’application, le cas échéant par actes délégués. Cet ajustement nécessaire conditionne l’impact de la mesure et in fine l’adoption des utilisateurs.

A la demande de la Commission, Open PEPPOL a précisé sa position concernant le projet de Directive facture électronique. En tant que projet de grande échelle (Large Scale Project) sponsorisé par la Commission, Open PEPPOL souhaite attirer l’attention sur les travaux accomplis pour le développement de la facture électronique de l’e-procurement public en Europe. PEPPOL s’est en effet illustré par une contribution déterminante dans deux domaines:

  • Le choix d’un modèle d’implémentation pérenne reposant sur des standards ouverts pour l’e-procurement qui offre aux utilisateurs une opportunité de passer plus facilement de la théorie à la pratique ;
  • Un réseau ouvert et sécurisé permettant l’acheminement des messages de l’e-procurement selon un protocole sécurisé.

Le modèle d’implémentation PEPPOL BIS « Business interoperability specification » repose exclusivement sur des standards, ceux découlant des recommandations des travaux CEN BII et du CWA 16562 permettant de décrire les échanges électroniques utilisés par l’e-procurement (et la facture électronique) dans l’exécution post-attribution (post-award) des marchés. Le réseau PEPPOL qui a l’ambition de réduire les obstacles du défaut d’interopérabilité des réseaux privés en proposant un protocole sécurisé et un cadre légal conforme à la gouvernance PEPPOL (matérialisé par un accord « Transport Infrastructure Agreement » avec les opérateurs de services).

Modèle sémantique unique, syntaxes multiples ?

Open PEPPOL fait remarquer qu’au delà d’un modèle sémantique commun résultant des travaux du CEN ; il faut aussi que les syntaxes supportées restent en nombre limité (même si la directive laisse les opérateurs implicitement libres de ce choix) (1). Sans cette précaution, le coût de la conversion d’une syntaxe à une autre pourrait réduire drastiquement les bénéfices de l’interopérabilité.
A l’appui de ce constat, Open PEPPOL cite une étude de l’ESV (Ministère des Finances Suédois) qui révèle que le coût de la conversion de formats pour 540 collectivités publiques Suédoises (quantité négligeable au regard de nos 50 000 collectivités) pourrait s’élever à 10 Millions d’euros. Ce coût pourrait affecter sévèrement le modèle économique avec un impact estimé à deux fois celui correspondant à la mise en place du service. Bien sûr la collectivité faire reposer cette tâche sur son opérateur de service qui lui-même cherchera à éviter de faire des conversions en tous sens par des accords bilatéraux avec d’autres opérateurs, tout comme l’éditeur de logiciel financier ou comptable devra faire le choix d’un format unique d’import ou d’export de facture. (2)

Pour Open PEPPOL, l’utilisation de formats structurés est aussi fondamentale que les standards et équivaut à faire un choix stratégique pour l’avenir de l’e-procurement. Les technologies XML intimement liées au développement des formats structurés sont seules capables à terme de garantir une interopérabilité des systèmes et un traitement (semi) automatisé des données. En effet au-delà de la problématique du choix d’un modèle standard, le bouclage systématique des flux (catalogue-commande-facture-paiement) qui est le seul à permettre l’effet de levier escompté avec un maximum de gains immédiats, repose sur ces choix technologiques. Les taux d’erreurs rencontrés dans le rapprochement commande-facture (invoice reconciliation) sont une parfaite illustration des conséquences de choix inadaptés.

Le modèle BIS dérivé du CEN/BII prôné par Open PEPPOL, constitue le dénominateur commun de la facture électronique pour les échanges transfrontières en Europe. Open PEPPOL recommande à la Commission de prendre des actes délégués (3) pour préciser la façon avec laquelle elle entend assurer l’interopérabilité des formats, des traitements et les protocoles de transmission notamment dans le cadre des échanges transfrontières, domaine où la Commission peut exercer pleinement son autorité de régulation.

Si le modèle sémantique unique se fonde uniquement sur le CWA 16562 pour créer une nouvelle norme, alors Open PEPPOL estime que le CEN (qui a largement anticipé ce travail avec la 3ème vague de développement du CEN/BII) devra disposer de 24 mois pour développer cette nouvelle norme, réduisant d’autant la période de transposition. Même si le délai de 48 mois qui correspond à un allongement du délai classique en raison des impacts technologiques de la dématérialisation peut paraître excessivement long ; la proposition d’Open PEPPOL nous assez réductrice car elle ne tient pas compte des difficultés de transposition qui croit proportionnellement avec la disparité de nos législations.

Quelle forme d’obligation et sous quels délais ?

Si le modèle sémantique unique se fonde bien exclusivement sur le CWA 16562 pour créer une nouvelle norme, alors Open PEPPOL estime que le CEN (qui a largement anticipé ce travail avec la 3ème vague de développement du CEN/BII) devrait disposer de 24 mois pour la développer, réduisant d’autant la période de transposition. Même si le délai de 48 mois qui correspond à un allongement du délai classique de transposition en raison des impacts technologiques de la dématérialisation peut paraître excessivement long ; la proposition d’Open PEPPOL nous semble par trop réductrice car elle ne tient pas compte des difficultés de transposition qui croissent proportionnellement à la disparité de nos législations. C’est le cas notamment de la France où la prolixité de nos textes réclame de la part de nos autorités bien plus de clairvoyance qu’ailleurs.

Open PEPPOL souhaite encourager l’adoption non seulement en rendant obligatoire l’acceptation des factures électroniques par les autorités administratives sous la réserve que ces factures respectent les conditions prévues par la directive mais aussi en permettant aux collectivités de l’imposer aux entreprises. Pour illustrer les vertus de l’obligation, Open PEPPOL prend l’exemple de la Norvège qui après avoir autorisé la transmission de factures électroniques le 1er juillet 2011, décida un an plus tard au vu de résultats mitigés, de la rendre obligatoire pour les nouveaux marchés des administrations centrales notifiés après cette date. Depuis plus d’ 1 million de factures ont été reçues à un rythme de croissance de 20 à 30% par mois.

Depuis 2010, la réponse dématérialisée aux marchés peut être imposée par l’acheteur public. Ne serait-il pas envisageable d’imposer la facturation électronique dans les mêmes conditions aux entreprises voire même descendre en dessous des seuils communautaires. Il reste à mesurer les conséquences d’une telle mesure pour les entreprises qui dans l’esprit du législateur et en vertu du principe d’égalité de traitement, doit rester neutre sur le plan économique ; article 16 de la directive – « la présente directive n’entraîne pas de coûts ou de charges supplémentaires pour les entreprises ». Alors que la Directive reste muette sur ces modalités, le mode d’emploi cher à Open PEPPOL nous semble d’autant plus indispensable.

(1) article 11 du projet de Directive : « L’interopérabilité sémantique implique que le sens exact de l’information échangée soit préservé et bien compris de manière univoque, indépendamment de la manière dont cette information est physiquement présentée ou transmise »

(2) Dans le cadre du CEN/BII 2, le CEN s’est livré à un « mapping » entre le format pivot du profil facture (information requirements model) et les syntaxes (obligatoires) UBL 2.0 et CII « Cross Industry Invoice » CCTS V2.0

(3) acte délégué : article 290 TFEU « Un acte législatif peut déléguer à la Commission le pouvoir d’adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l’acte législatif. »