Au Mexique, la facturation électronique obligatoire pourrait constituer la parade contre la fraude

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Le site de l’administration fiscale Mexicaine (1) prévient les entreprises « A compter du 1er avril 2014, le seul moyen valide de vérification fiscale est la facturation électronique« ; ajoutant que le service de facture électronique (CFDI) est gratuit. En rendant obligatoire la facture électronique, l’autorité fiscale retire au fournisseur le droit de générer lui-même sa facture, s’il n’a pas préalablement téléchargé un récépissé fiscal signé électroniquement. Par ce dispositif, l’administration fiscale mexicaine rend obligatoire la déclaration préalable, un moyen habile et efficace de lutte contre la fraude.

Obligatoire pour les entreprises réalisant un chiffre de plus de 250 000 pesos (20 000 USD) la facture dématérialisée doit obligatoirement être accompagnée d’un récépissé fiscal CFDI (Comprodentes fiscales digitales por Internet) lui-même assorti d’un cachet électronique apposé à l’aide d’un certificat électronique CSD (Certificado de Sello Digital) émis par l’administration fiscale.

Tout cela pourrait paraître bien compliqué, s’il ne s’agissait avant tout d’authentifier la transaction par un cachet fiscal dont l’opposabilité « de jure » est fondée sur l’émission d’un certificat CSD contresigné par l’entreprise . Cette contre-signature est apposée en téléchargeant l’application SOLCEDI (Solicitud de certificado Digital) permettant de générer une signature électronique avancée FIEL (firma electronica avanzada) sur le récépissé fiscal.

Le traitement de la facture s’effectuera gratuitement par l’intermédiaire d’un prestataire (2) de validation. Le rôle du prestataire est d’opérer la validation technique du document, de vérifier que le CFDI correspond bien au CSD délivré par l’autorité et authentifiant l’entreprise pour finalement délivrer un récépissé fiscal (ou cachet). L’émetteur devra d’autre part disposer d’un archivage électronique permettant de conserver les CFDI au format XML et le cachet fiscal électronique sur son système pour une période minimale de 5 ans.

Le CFDI se compose d’un fichier primaire XML et d’un PDF généré automatiquement à partir du fichier primaire. Ce PDF devra être imprimé et joint obligatoirement au bordereau d’expédition des marchandises conformément à l’article 29a du code fiscal (Código Fiscal). Il fera figurer le code-barre (ou 2 D ?) comportant le numéro de série du CSD, une légende indiquant que c’est une représentation imprimée du récépissé fiscal électronique avec l’heure et la date d’émission.

La facture comportera un certain nombre de champs obligatoires. Si l’entreprise possède plus d’un établissement, l’adresse de celui ayant émis la facture devra figurer. Les éléments optionnels de nature non fiscale (informations commerciales) sont placées dans la section « Addenda » seulement après validation par les services fiscaux. Les informations complémentaires de type sectoriel (automobile, grande distribution etc.) seront spécifiées par la balise <complemento>.
Le logiciel ou l’ERP du fournisseur devra intégrer les pré-requis techniques prévu à l’annexe technique 20 (3) , prévoir une extraction de données en vue d’une transformation du fichier au format XML 3.2. Il est dommage que le choix de format ne repose pas sur un standard international reconnu tel qu’UBL ou UN/CEFACT ce qui impose au fournisseur un « mapping » préalable des données et un travail d’intégration supplémentaire pour générer ce format. Il est à noté que les spécifications fonctionnelles attendues du prestataire portent à minima sur les aspects suivants :

  • La validation technique des CFDI (4)
  • Le traitement unitaire des CFDI hors « addenda » et « complemento »
  • l’acceptation des certificats CSD
  • la génération du document CFDI conformément à l’annexe 20 technique
  • la validation technique et la certification du document CFDI
  • la possibilité de consultation, de conservation, d’impression des CFDI durant 3 mois
  • l’envoi immédiat d’une copie du CFDI validé à l’administration fiscale

En conclusion, le dispositif mis en place par l’autorité fiscale mexicaine semble constituer une solution originale de parade contre la fraude en délivrant un cachet fiscal validant la facture avant même que celle-ci soit émise par le fournisseur. En découplant le traitement fiscal du processus de facturation, le dispositif stigmatise les deux statuts de la facture, celui d’original fiscal et celui de document commercial. Dissocier les deux, permettrait d’envisager un traitement différencié, comme la possibilité de capture de la TVA à la source.
Plusieurs remarques toutefois sur les inconvénients possibles du système. L’emploi systématique de la signature électronique, sujet amplement débattu, risque d’alourdir le traitement. La spécification technique prévoit un traitement unitaire des factures mais qu’en est-il d’un lot de factures ou d’une séquence de factures (traitement batch) ? Si une modification intervient sur la facture, l’annulation de cette dernière pour en émettre une nouvelle, semble plus délicate avec un tel processus ; la question des avoirs ne semble pas évoquée non plus. Certains fournisseurs ou secteur d’activité peuvent exiger l’ajout d’informations contextuelles et devront le faire en « addenda » après-coup, ce qui nécessite une réinjection de la facture après traitement fiscal dans l’ERP du fournisseur. Malgré ces inconvénients, la piste semble prometteuse et mériterait d’être examinée avec plus d’attention au niveau européen dans le contexte d’une nouvelle norme sur la facture électronique.

(1) Servicio de administracion tributaria (SAT) [http://www.sat.gob.mx/]
(2) A ce jour 67 PAC (Proveedores Autorizados de Certificacion) ont été référencés
(3) Annexo 20 de la ley del ISR

(4) Portail de vérification des CFDI [https://verificacfdi.facturaelectronica.sat.gob.mx/ ]