La Direction des Affaires Juridiques explique son guide de la dématérialisation

La présentation du guide de la dématérialisation à l’OEAP le 14 octobre, fût l’occasion d’échanges nourris, ce qui tend à prouver l’intérêt des opérateurs économiques et des acheteurs pour le sujet.

Tout d’abord, la Direction des Affaires Juridiques confirme que le guide de la dématérialisation n’a pas de portée réglementaire, il s’agit tout au plus d’un mode d’emploi et d’un recueil de bonnes pratiques destiné aux acheteurs publics (et aux entreprises soumissionnaires) pour la mise en place de la dématérialisation.

Par ce guide, la DAJ veut répondre à plusieurs difficultés soulevées par la dématérialisation : la sous-estimation des problèmes d’organisation aussi bien du côté des soumissionnaires que des acheteurs, l’absence d’harmonisation des plateformes et donc des modes opératoires, la chaîne de dématérialisation encore incomplète, enfin la signature électronique.

La DAJ nous rappelle que le « profil d’acheteur » est confondu avec la plate-forme de dématérialisation, quelque soit sa forme, site, portail de collectivités (eBourgogne) ou portail générique (achatpublic.com).

Quel périmètre pour le profil d’acheteur ?
Le profil d’acheteur regroupe la publication des avis, le DCE (dossier de consultation), la réception des offres, le système de messagerie et d’échanges sécurisés. Pour les Mapa (procédures adaptées < à 90 000 Euros) la DAJ encourage l’utilisation du sas d’échanges sécurisé (horodatage, preuves d’envoi etc.) sans l’imposer, ce qui est regrettable, car l’échange des offres par mail nous parait insuffisant et dangereux pour l’entreprise. Avec près de 80% des appels d’offres, les mapa pourraient être un fabuleux accélérateur de la dématérialisation comme l’a déjà prouvé eBourgogne.

Dematérialisation rime trop souvent avec Rematérialisation.
La DAJ encourage la dématérialisation de bout en bout et pourtant ne peut s’opposer à la rematérialisation des dossiers car le code des marchés l’autorise.
Nous assistons encore à de trop nombreux cas de rematérialisation des offres. Frank ROZE des laboratoires BMS s’insurge,  » Comment justifier auprès de sa direction, que l’impression complète et l’envoi par courrier d’un dossier préalablement dématérialisé, répond à la demande d’un acheteur public…après tant d’efforts et d’argent consacrés à mettre en place la dématérialisation dans nos services. ». Cela à de quoi refroidir les meilleures volontés. Lors du récent chat du Bercy colloc, le mot rematérialisation est revenu très souvent à la bouche des acheteurs. A leur décharge, il est vrai qu’ils sont encore trop peu nombreux à disposer de la signature électronique. Tant que cela durera, il est fort à craindre que la dématérialisation reste un processus bancal.
Dans ces conditions, n’est-il pas prématuré d’envisager de l’étendre à la chaîne complète ?
Le chaînage avec la partie hors procédure (mise au point du marché, DC13, avenant, reconduction etc.) voire la partie exécution (bon de commande, e-catalogue, facturation, paiement) est un point clé pour les entreprises. Du côté des trésoreries, l’infrastructure de télétransmission est en place, alors pourquoi cette « rupture de charge ». N’est-il pas prématuré d’envisager un chaînage complet tant que la notification est encore largement rematérialisée par les acheteurs. Il serait pourtant facile de laisser un canal d’échanges sécurisés et tracés, pour chaque consultation. Ce canal resterait ouvert au-delà de la phase de passation afin d’assurer la continuité de la dématérialisation pour la durée du marché.
Pour surmonter la difficulté de la mixité des modes opératoires, Monsieur Serge DOUMAIN de la DAJ, précise que le nouveau DC1 (remplaçant l’ancien DC4 depuis septembre 2010) comporte une première section XML complétée et signée électroniquement par l’entreprise et une deuxième section qui sera remplie par le pouvoir adjudicateur sans dévalider la signature de l’entreprise. C’est évidemment un progrès considérable même si la question de la conservation, dans un format d’archivage, PDF/A par exemple, reste à résoudre.

La signature électronique en question
La signature fait toujours débat, la DAJ a déployé des efforts de pédagogie pour préciser les précautions d’usage dans son utilisation, les documents à signer, les vérifications à effectuer etc. Elle confirme que la signature d’un zip regroupant tous les documents revient à signer au dos d’une enveloppe et n’a aucune valeur juridique ; la signature étant la manifestation du consentement sur chaque document individuel.
Sur le manque d’interopérabilité de la signature dans les marchés publics, en raison de l’absence de standard commun due à l’hétérogénéité des parapheurs et des formats, Bruno BOUTTEAU, PEPPOL nous rappelle « que le format XADES est un choix Européen et que l’infrastructure de vérification des certificats pour les opérateurs transfrontaliers souhaitant répondre à un appel d’offres en France est déjà en place » mais qu’il faut bien convenir que cela laisse entier le problème de la disparité des plateformes .

Attention à la signature électronique des mandataires
Le DAJ nous rappelle que les règles de la dématérialisation et de la signature électronique s’imposent aussi aux mandataires vis-à-vis de leur mandant. Dans les opérations de sous-traitance ou de co-traitance, les mandataires doivent signer électroniquement. Si certains acheteurs étaient amenés à accepter le DC5 du mandataire signé manuscritement puis scanné, dès l’instant que le mandant a signé électroniquement, il faut voir là une simple tolérance, tout à fait transitoire et sans aucun texte à l’appui. Les bureaux d’études devront donc eux aussi investir dans une signature électronique pour ne pas mettre le maître d’œuvre en défaut. La question des parapheurs électroniques des plates-formes autorisant la co-signature reste entière…

Plus d’infos sur la signature cf. : la signature électronique

Le guide d’achat du GEM DEMAT
Pour compléter le dispositif, les travaux du GEM DEMAT aboutiront à la publication d’un « guide d’achat » fin 2010. Celui-ci vient compléter le guide de la dématérialisation de la DAJ en fournissant des recommandations aux acheteurs et opérateurs économiques dans la mise en œuvre de la dématérialisation.
Ce guide d’achat dont le périmètre couvre l’ensemble de la dématérialisation à l’exclusion des enchères, des systèmes d’acquisition dynamiques et de l’archivage, prône la standardisation des plates-formes et le découplage des outils de signatures . Parmi ces objectifs, permettre aux acheteurs de mieux définir leur besoins en s’appuyant sur des éléments de cahier des charges pour le choix d’une plate-forme ou encore les aider dans la rédaction d’un RC. Du côté des entreprises, développer une soumission expresse encore appelé « circuit court » qui permettrait de désigner à la plate-forme le répertoire de travail où elle peut trouver les fichiers à télécharger, mettre à disposition plusieurs applets de vérification de signature accessible des acheteurs, proposer des règles de nommage des fichiers etc.
Guide de la dématérialisation et guide d’achat sont là pour éviter l’éparpillement de l’information en fournissant un socle stable et définitif, transposable par tous des acteurs de la commande publique. Initiative louable qui évitera sans doute le très dommageable copier, coller des cahiers des charges.
Il faut dire que la DAJ n’est pas avare de ses efforts pour convaincre mais toujours dans la limite de ses prérogatives. Le guide ne peut se substituer au code des marchés « la DAJ ne veut être le prescripteur de nouvelles dépenses pour les Administrations » … seul le RGS est la clé pour passer à la phase industrielle » précise Monsieur Serge DOUMAIN, il ajoute qu’il est peu probable que d’autres secteurs d’activité se voient imposés la dématérialisation obligatoire, comme ce fût le cas pour l’informatique au 1er janvier 2010; en tous cas rien avant 2015. La DAJ compte plus sur une adhésion volontaire, que réglementaire des opérateurs économiques.