Copie fiable, numérisation et conservation des factures

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Avec la digitalisation des processus, on assiste à une multiplication des textes fixant de nouvelles conditions de numérisation des documents, pour la facturation celle des factures originales comme les pièces justificatives constitutives de la piste d’audit.

L’arrêté du 7 janvier 2016 vient préciser les conditions de mise en œuvre de l’article L102B du Livre de procédure fiscale visant à établir des contrôles documentés pour l’établissement d’une piste d’audit fiable constitutive d’un des trois moyens de sécurisation des factures électroniques au sens de l’article 289 VII. Cet arrêté entérine la possibilité de numérisation et de conservation des pièces justificatives sous la condition d’une reproduction à l’identique.

Le transfert des documents mentionnés au I bis de l’article L. 102 B établis originairement sur support papier vers un support informatique est réalisé dans des conditions garantissant leur reproduction à l’identique. Le résultat de cette numérisation est la copie conforme à l’original en image et en contenu.

Le document ainsi numérisé sera conservé sous format PDF (pour assurer la portabilité et la pérennité du format) et assorti d’une signature électronique RGS « référentiel général de sécurité » de niveau 1 étoile. Gardons ce dernier point en mémoire. Nous constaterons plus loin que l’administration fiscale offre une plus grande souplesse dans le niveau de certification requis par rapport aux dispositions prévues par le législateur sur la copie fiable.

Quelle définition pour la copie fiable ?

Rappelons d’abord que le juge reste souverain quant à l’appréciation de la valeur probatoire d’un document et qu’aucun système ne peut se substituer à cette décision en produisant preuves irréfragables mais seulement ayant un caractère de présomption simple valable jusqu’à preuve du contraire.
Avec la transformation numérique, il devenait indispensable de dépoussiérer certains textes comme l’article 1379 du code civil, c’est l’objet du décret du 5 décembre 2016 qui vient préciser les conditions par lesquelles une copie numérique présente les conditions de fiabilité suffisantes pour constituer une copie conforme à l’original. Dans cette hypothèse, le procédé de reproduction s’il est électronique devra remplir plusieurs conditions, je cite :
Le procédé de reproduction par voie électronique doit produire des informations liées à la copie et destinées à l’identification de celle-ci. Elles précisent le contexte de la numérisation, en particulier la date de création de la copie. La qualité du procédé doit être établie par des tests sur des documents similaires à ceux reproduits et vérifiée par des contrôles.


L’intégrité de la copie est par ailleurs attestée par une empreinte électronique qui prévient et permet de détecter toute modification ultérieure. Cette condition étant remplie soit par une signature électronique qualifiée, soit un cachet serveur qualifié, soit un horodatage qualifié au sens du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 c’est eIDAS. Ce texte a deux implications :

  • Le système de production de preuves et notamment d’archivage électronique aujourd’hui régit par la norme NF Z42-013 qui établit les conditions techniques de conservation et d’intégrité de documents nativement électroniques par scellement numérique se voit étendu au champ de la numérisation pour les documents originaux papier.
  • A la différence du document électronique, le document papier doit passer par une phase de numérisation, procédé dont la qualité devra être établie et attestée par des tests et vérifiés par des contrôles.

La nouvelle norme NF Z42-026 pour la chaîne de numérisation

C’est pourquoi en réponse au législateur, la normalisation devait accoucher elle aussi d’un avatar de la NFZ 42-013 qui transposée au chantier de numérisation donne naissance à la NFZ 42-026 dont la promulgation est prévue en mai de cette année. Cette norme vise à établir par différents moyens les modes contrôle et de vérification et de tests portant à la fois sur le dispositif technique, les fichiers traités et la chaîne dans son ensemble permettant d’attester la fiabilité du procédé de numérisation.
Retenons simplement, que par ces mesures le législateur vise évidemment à prévenir que tout risque de production de faux. Il est facile d’imaginer que des documents originaux papier pourraient par le traitement d’une chaîne de numérisation retrouver une certaine virginité par la disparition de mentions gênantes.

La numérisation des factures papier originales

Pour parachever ce vaste chantier de digitalisation, un dernier arrêté en date du 22 mars 2017 vient modifier l’article L102B du Livre de procédure fiscale en rendant possible le remplacement de l’original par une numérisation dont elle est la copie conforme.
Le transfert des factures établies originairement sur support papier vers un support informatique est réalisé dans des conditions garantissant leur reproduction à l’identique. Le résultat de cette numérisation est la copie conforme à l’original en image et en contenu.

Les opérations d’archivage des factures sont définies selon une organisation documentée, permettant des contrôles internes et garantissant la lisibilité, l’intégrité et la disponibilité des factures. Les factures sont conservées dans un format présentant une portabilité et une pérennité pour la durée de conservation précisant qu’il s’agit de PDF A/3 (ISO 19005-3). Enfin le fichier sera assorti cumulativement :

  • d’un cachet serveur fondé sur un certificat conforme, au moins au référentiel général de sécurité (RGS) de niveau une étoile ;
  • d’une empreinte numérique ; d’une signature électronique fondée sur un certificat conforme, au moins, au référentiel général de sécurité (RGS) de niveau une étoile ;
  • Ou de tout dispositif sécurisé équivalent fondé sur un certificat délivré par une autorité de certification figurant sur la liste de confiance française (Trust-service Status List -TSL)
  • Chaque fichier est horodaté, au moins au moyen d’une source d’horodatage interne, afin de dater les différentes opérations réalisées.

En résumé

De notre point de vue, concernant le procédé de numérisation, le législateur plutôt de trancher dans le vif en établissant une position définitive ouvre largement la porte à l’interprétation du juge. En cas de litige, le juge devra forger son intime conviction à partir d’un certain état de l’art et d’un faisceau de preuves attestant de la fiabilité.
Sur le plan fiscal, il est désormais possible de digitaliser la facture fournisseur comme des pièces justificatives de la piste d’audit et de les conserver sur le même système d’archivage. L’administration fiscale fixe un niveau d’exigence plus faible pour le certificat électronique RGS 1* que le niveau qualifié prévu par le code civil qui lui s’est calé sur le règlement eIDAS, il n’exclue pas toutefois la possibilité pour l’opérateur de disposer d’un certificat émis par une autorité présentant le niveau qualifié requis par le TSL. En contrepartie le niveau d’exigence est plus élevé sur le dispositif technique qui cumule les fonctions de scellement numérique et d’horotage.

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Référence des textes :

  • Arrêté du 7 janvier 2016 relatif aux modalités de numérisation des documents constitutifs des contrôles documentés et permanents mis en place par une entreprise mentionnés au 1er du VII de l’article 289 du code général des impôts
  • Décret n° 2016-1673 du 5 décembre 2016 relatif à la fiabilité des copies et pris pour l’application de l’article 1379 du code civil
  • Arrêté du 22 mars 2017 fixant les modalités de numérisation des factures papier en application de l’article L. 102 B du livre des procédures fiscales