Comment la France opte pour la facturation électronique B2B et l’e-Reporting de la TVA ? (3ème partie)

B2B
Le mécanisme d’e-Reporting TVA

Dans notre précédent article nous avons vu que le choix d’une plate-forme centrale à l’Italienne soulevait de réelles questions sur le rôle de Chorus Pro pour l’instant limité au seul secteur public. Quelle que soit la décision prise concernant le futur de Chorus Pro, il semblerait bien que le portail du secteur public occupe une fonction centrale dans la transmission des données fiscales à la DGFiP. La plate-forme pourrait-elle se voir confier la mission d’effectuer ce e-Reporting ? Rappelons que l’e-Reporting est moins contraignant que le système clearance mis en place par certains pays comme l’Italie, le Mexique ou la Turquie qui ressemble à une une autorisation de facturer. Le e-Reporting est déjà appliqué par d’autres comme la Hongrie, la Corée du Sud, Taiwan ou la Grèce. Ce modèle peut aussi s’inscrire dans un modèle transactionnel temps réel « Continuous Transaction Control » (CTC) qui consiste à transmettre instantanément les éléments de facturation sous la forme d’un fichier de données. La problématique dépasse toutefois la simple transmission de données car certaines conditions doivent être remplies.
La question du contenu de ce fichier « tax report » et l’étendue des données transmises est un sujet crucial. Pour alléger les obligations et simplifier la vie des entreprises, les recommandations du Forum national de la Facturation Electronique (FNFE) portent sur la limitation du jeu de données susceptible d’être transmis et la suppression concomitante de certaines formalités déclaratives comme les déclarations d’échanges de biens ou de services (DEB / DES).

D’autres recommandations sur le mécanisme d’e-Reporting visent les conditions de transmission. Le FNFE insiste aussi sur la nécessité de limiter les formats de facturation, de séparer les flux de factures originales des flux de données de contrôle en limitant les données transmises au strict nécessaire et de faire en sorte que ce modèle de données soit conforme aux exigences de la norme européenne sur la facturation (EN16931).
Ce mécanisme devrait être assuré par certains prestataires de dématérialisation agréés et dont la tâche consisterait à extraire les données obligatoires du flux de facturation, aider l’entreprise à produire ces données, organiser ces flux et gérer aussi les échanges entre le vendeur et l’acheteur en traitant le retour des flux statuts de paiement. En effet, le point d’application de la taxe doit aussi tenir compte du fait que les exigences déclaratives ne peuvent être symétriquement appliquées sur la base des seules factures transmises, mais doivent aussi provenir de flux d’e-Reporting de chaque entreprise (une facture peut être rejetée, les dates de réception ou de paiement ne sont pas forcément les mêmes pour chaque assujetti (avec des échéances non symétriques). Pour la facturation d’un bien, le fait générateur est le plus souvent la livraison correspondant à l’intégralité du transfert de propriété ; pour un service, la constatation s’effectue au fil de la prestation matérialisée par le paiement partiel ou intégral. Certains cas de facturation métiers plus complexes devront aussi être analysés comme les débours, les agents, les notes de frais, la sous-traitance etc. Il y a donc là une complexité qui va bien au delà d’une simple formalité déclarative et qui ouvre un champ encore inexploré d’échanges entre les opérateurs économiques. Par exemple, le développement d’un flux de réponse à la facture pourrait s’avérer nécessaire (comme le profil INVOICE RESPONSE de PEPPOL) permettrait aussi d’améliorer la gestion de la trésorerie en offrant une meilleure visibilité sur les paiements.
L’obligation B2B pourrait déboucher finalement sur d’autres développements dans la lutte contre la fraude ou le partage de données. Par exemple, dans le système de clearance, chaque facture est identifiée par une empreinte technique (HASH) de telle sorte que la facture est authentifiée de façon univoque et dispose d’une traçabilité complète. On pourrait imaginer d’autre mécanismes de sécurisation dans la blockchain facilitant la lutte contre la fraude en créant une chaîne de facturation immuable au sein d’un registre partagé (DLT) entre plusieurs parties-prenantes facilitant la vérification de l’information et le contrôle de la piste d’audit fiable.